
Alors qu’à Marie-Galante j’avais découvert à l’indigo, j’ai finalement fait l’atelier pratique à la Désirade. Alors qu’à Marie-Galante, c’était une sorte de conte initiatique, à la Désirade c’est une ambiance un peu baba-cool. Les deux sont cools, et je suis ravie d’avoir découvert à Marie-Galante et pratiquer à la Désirade.
Tombé en amour, il y a quelques années, pour cette plante magique oubliée qui donne le bleu, Ghislain entament alors une longue investigation historique. Après six ans de recherches et de stages en teintures végétales auprès de maîtres teinturiers en Provence, il inaugure la Maison de l’indigo en janvier 2011 sur l’île de la Désirade.


Toute plante tinctoriale est également riche en vertus médicinales ; les textiles teints par ces végétaux leur confèrent donc aussi des bienfaits pour la santé. Par exemple, les écharpes ou étoles en soie, selon la fleur avec laquelle elles sont colorées, auraient une action contre certaines pathologies : maux de gorge, maux de tête, extinctions de voix…
Grâce à un long apprentissage, Ghislain est devenu incollable sur les plantes colorantes endémiques de Guadeloupe. Une multitude d’entre elles, campêche, raisinier, amandier pays, flamboyant nain, fleurs d’hibiscus, cosmos, liane corail, présentent cette propriété, que ce soit au niveau de leur bois, racines, feuilles ou fleurs, de même que certaines épices comme le roucou, le curcuma, pour ne citer qu’eux.

Certains animaux présentent également ces propriétés : nous connaissons tous l’encre de la seiche, mais sans doute beaucoup moins celles du murex Purpura Patula, communément appelé « Burgan des teinturiers », coquillage réputé pour sa sécrétion jaunâtre virant au vert puis au pourpre dès contact avec l’air, répandu au Mexique, mais que l’on trouve aussi sur les côtes antillaises.

Pour faire des motifs sur le tissu teint, on utilise une technique originaire du japon, appelée shibori qui consister à lier le tissu, faire des nœuds. Il existe plusieurs façon de nouer, coudre, tordre ou bloquer le tissu avant de le teindre, ce qui produit différents types de motifs.

Le Kanoko shibori est une méthode qui correspond au tie-dye occidental, ou teinture par nouage. Il s’agit de nouer certaines parties du tissu pour obtenir le motif désiré, traditionnellement avec du fil. Le motif dépend du serrage des nœuds, et de leur position. Le ne-maki shibori est une variante, où le tissu est noué autour de billes ou de petits cailloux.
Pour le Miura shibori, le tissu est attaché par des boucles de fil. Pour cela, on utilise une aiguille munie d’un crochet pour pincer le tissu, et enrouler une boucle de fil autour. Le fil n’est pas noué, et seule la tension appliquée maintient les parties de tissu. Le résultat présente des motifs légers, comme aquatiques. Comme aucun nœud n’est utilisé, la facilité d’utilisation de cette technique fait qu’elle est assez répandue.
Le Kumo shibori est une technique qui se base sur le plissage fin et régulier du tissu. Celui-ci est ensuite attaché étroitement. Le motif résultant présente des lignes très fines, semblables à une toile d’araignée. L’exécution doit être très précise pour obtenir un bon résultat.

Pour le Nui shibori, un fil est passé au point lancé lâche dans le tissu, puis resserré très fortement. La tension est essentielle pour un bon résultat. Chaque fil est ensuite noué avant le bain de teinture. Cette méthode permet d’obtenir des motifs mieux contrôlés et plus variés, mais elle est aussi plus longue à exécuter.
Avec l’Arashi shibori, le tissu est enroulé diagonalement autour d’un mât ou d’un bâton, puis fermement maintenu en enroulant un fil autour du mât, enfin, le tissu est tassé le long du mât. On obtient un motif de plissé le long de la diagonale. Arashi est le mot japonais désignant la tempête ; en effet, les motifs diagonaux évoquent la pluie en biais d’une grosse tempête.
L’Itajime shibori est une technique qui utilise des pièces de matériau solide pour maintenir le tissu. Traditionnellement, des plaques en bois étaient utilisées, entre lesquelles le tissu est maintenu par des ficelles nouées autour du dispositif. De façon plus moderne, des plaques en matière plastique sont utilisées, maintenues avec des pinces. Les plaques empêchent la teinture d’atteindre le tissu pris à l’intérieur.

Le Tataki Zomé est une technique d’art textile ancienne qui utilise les pigments naturels des plantes pour teindre les tissus. Originaire aussi du Japon, cette technique repose sur l’action de marteler les végétaux afin de libérer leur teinture et créer des motifs uniques.
Avant de commencer,on s’assure que son tissu est propre et sec. On utilise de préférence du coton ou du lin, et je l’ai lavé au préalable pour enlever tout résidu qui pourrait empêcher la teinture de pénétrer correctement. Puis je choisissez des végétaux frais et riches en tanin. J’ai choisi une fougère, des hibiscus, une feuille de lierre et une orchidée.

Je place mon tissu sur une surface plate et je dispose les végétaux sur le tissu. Je les place face vers le bas, car c’est la partie en contact avec le textile qui libérera la teinture. Je pose ensuite une chute de tissu sur les végétaux, sur laquelle je taperai directement. Avec votre maillet, je martèle doucement le tissu. Je prends le temps de bien taper la surface uniformément pour m’assurer que tous les végétaux transfèrent leur couleur. Une fois que j’ai fini, je retire délicatement les végétaux. Si de petits résidus de plantes restent accrochés au tissu, il faut attendre que celui-ci soit sec pour les enlever en grattant délicatement le tissu. Je laisse sécher complètement mon tissu.
Pour conserver l’impression végétale dans le temps et éviter qu’elle ne parte dès le premier lavage, je la fixe à l’aide de sulfate de fer. Cela va cependant foncer un peu le tissu. Il est aussi possible de faire le mordançage par trempage dans un bain d’alun de potassium. Et contrairement au sulfate de fer qui peut altérer la coloration, l’alun permet de fixer les colorants végétaux sur les fibres textiles, sans modifier les couleurs.
